JusticeAbus sur mineurs: le prof vaudois conteste ses 5 ans ferme
Condamné à Yverdon pour actes sexuels sur des enfants et des ados, le trentenaire fait appel. Il espère décrocher le sursis.
- par
- Evelyne Emeri
Le sursis ou le sursis partiel est-il compatible avec les versions des victimes retenues par le Tribunal correctionnel d’arrondissement de La Broye et du Nord vaudois et la sanction prononcée? Compatible avec la haute crédibilité des témoignages recueillis par les enquêteurs? L'avocate de Jacques*, Me Margaux Loretan, a considéré que oui. Elle a ainsi déposé un appel auprès du Tribunal cantonal pour contrer la condamnation de son client d'office. Objectifs visés: tenter de réduire la quotité de la peine, voire les qualifications, et obtenir une peine ferme moindre, certains faits n'ayant pas été admis par le prédateur présumé. Interpellée par lematin.ch, la femme de robe n'a répondu à aucune de nos sollicitations.
Adopté en Colombie à l'âge de 9 mois, l'enseignant de 30 ans ne nie pas avoir dérapé avec sept mineur(e)s, âgé(e)s entre 8 et 17 ans au moment des faits (2016-2021), ainsi qu'avec un adulte. Tous l'accusent d'abus, de gestes et d'attouchements à des fins d'autosatisfaction. Plusieurs cibles sont d'ancien(ne)s élèves ou des jeunes auxquelles il dispensait des cours particuliers. S'il nuance habilement quelques-uns de ses agissements - «C'était des chatouilles» -, il conteste en revanche fermement toute agression déviante ou sexuelle dans un des cas. «Ben oui. Je sais ce que j’ai fait avec les autres. Avec elle, il ne s’est jamais rien passé, je n’avais pas de feeling particulier. Je donnais des cours à son frère», lâchera le prévenu aux débats de début octobre.
Risque de récidive
Condamné à 5 ans ferme pour actes d’ordre sexuel avec des enfants (+ tentative), contrainte sexuelle (+ tentative) et pornographie (+ tentative), le trentenaire a abusé de certaines proies plusieurs fois - jusqu'à 52 fois sur un garçon de 11-12 ans! - ou de manière isolée. La stratégie était toujours la même: Jacques profitait non seulement de son ascendant d'adulte sur les enfants et les ados, mais également de son statut de professeur. «Sans vergogne, pour assouvir ses besoins», dit le jugement.
Paraphilie pédophile
Les experts psychiatres ont conclu à un risque de récidive moyen à élevé, le patient présentant une paraphilie pédophile, des troubles de la personnalité et des traits d’immaturité. La Cour de première instance l'a aussi astreint à un traitement thérapeutique ambulatoire ainsi qu'à une interdiction à vie d’exercer toute activité professionnelle et toute activité non professionnelle organisée impliquant des contacts réguliers avec des mineurs.
À l'heure du verdict le 6 octobre dernier, les premiers juges avaient estimé sa culpabilité «écrasante» et sa prise de conscience «nulle»: «Il a agi égoïstement et trahi des enfants alors qu’il devait les protéger. Et ses quelques excuses sont apparues peu spontanées et sonnaient fausses. Ses agissements sont répugnants. Il a cédé à ses pulsions et s’en est pris à l’intégrité sexuelle de tous ces jeunes». Détenu dès le 28 août 2021, puis libéré le 24 mars 2022 à la faveur de mesures de substitution qu'il n'a pas respectées (ndlr. en particulier tout contact avec des mineurs), Jacques dort à nouveau en prison depuis le 9 juin 2023.
Appel joint du procureur?
Reste à savoir si le Ministère public profitera de l'appel principal interjeté par la défense pour y greffer son propre appel (ndlr. appel joint) le moment venu. Le procureur Johann Baruchet avait requis 5 ans et demi ferme, soit six mois de plus que la Cour, et une mesure thérapeutique institutionnelle.
*Prénom d'emprunt